Accueil / International / Gaza: «71 000 enfants risquent de mourir de malnutrition aiguë», alerte l’Unicef

Gaza: «71 000 enfants risquent de mourir de malnutrition aiguë», alerte l’Unicef

Mercredi 23 juillet, 111 ONG appellent la communauté internationale à agir contre la « famine de masse » qui s’étend dans la bande de Gaza. Sur place, les organisations sont mises en difficulté par le blocus, mais aussi par les frappes continues de l’armée israélienne. Et parmi les premières victimes, les enfants de la bande de Gaza. Baptiste Chapuis, responsable du plaidoyer et des programmes internationaux de l’Unicef, dépeint leur quotidien infernal et appelle à la levée immédiate du blocus humanitaire.

RFI : Quelles sont les dernières informations que vous avez sur la situation à Gaza 

Baptiste Chapuis : Les dernières informations qui me sont remontées de la part de mes collègues à Gaza sont absolument catastrophiques. Depuis le 2 mars s’organise un blocus quasi total de l’aide humanitaire. À Gaza, on affame des enfants et des familles et on tire sur eux à balles réelles, lorsque, au bord du désespoir, ils se rendent sur des points de distribution alimentaire auprès d’une fondation qui n’a d’humanitaire que le nom. Entre lundi 21 et mardi 22 juillet, en 24 heures, 15 personnes sont mortes de faim, dont quatre enfants.

On observe une détérioration rapide, drastique du nombre de personnes mortes de faim. Et ce que l’Unicef dit est simple : il faut de toute urgence, non seulement lever ce blocus qui est inhumain, mais surtout laisser les opérateurs comme l’Unicef, les agences de l’ONU, les ONG et les organisations palestiniennes travailler. Nous savons comment travailler. Nous avons des stocks alimentaires, d’eau potable et d’essence qui permettent de faire tourner les hôpitaux et les centres de santé et qui sont prépositionnés. Nous pouvons aujourd’hui donner accès à l’aide à la population palestinienne et aux enfants. Mais on nous empêche de faire notre travail. La conséquence ? C’est simple : on assiste à une catastrophe qui est d’origine humaine et des enfants meurent de faim tous les jours.

Il y a eu une nouvelle incursion sur le territoire palestinien, à Deir al-Balah lundi. Quel est l’impact de ces attaques sur vos missions 

À Deir al-Balah, on a eu un ordre d’expulsion de toute la zone. Je rappelle que c’est un territoire qui représente à peu près 5,6 km2, et où il y a entre 50 000 et 80 000 personnes. Donc, on a assisté à des situations de panique, avec des gens qui fuient, mais qui n’ont plus nulle part où aller, parce que 90 % du territoire palestinien est sous ordre d’évacuation. Nos bureaux sont dans la zone de Deir al-Balah. Collectivement, l’Unicef et les agences de l’ONU ont décidé de ne pas bouger, pour porter assistance aux personnes qui sont sur place. Mais aussi parce que nous craignons pour la sécurité de nos collègues là-bas.

Lorsque vous sortez des endroits où sont stationnés les personnels humanitaires, vous avez des forces armées, des bombardements, des tanks. Donc, non seulement cette situation, les Palestiniens et les enfants en sont les premières victimes, mais on menace aussi la vie des travailleuses et des travailleurs humanitaires. Chaque jour, à cause de ces ordres d’évacuation, ils risquent leur vie pour apporter un peu d’aide alimentaire, un peu d’eau et un peu de soin à une population qui est dévastée par 21 mois de conflit et, je le rappelle, presque 150 jours d’un blocus quasi total de l’aide humanitaire.

Quels sont les impacts de ces déplacements répétés sur les enfants 

Il faut se remettre à hauteur d’enfant. Leur quotidien est fait, d’une part, de bombardements. En moyenne, depuis 21 mois, 28 enfants ont été tués chaque jour, soit l’équivalent d’une classe entière. Ce chiffre-là devrait nous révolter toutes et tous, pour faire lever le blocus de l’aide humanitaire. Aujourd’hui, vous avez des enfants qui sont tués aux abords de points de distribution d’aide alimentaire. Mais même pour les enfants qui sont en situation d’être accueillis, par exemple, dans des centres d’éducation temporaire de l’Unicef. Ces endroits ne sont plus des sanctuaires. L’Unicef continue d’opérer en mettant en place des centres d’apprentissage qui accueillent aujourd’hui 57 000 enfants.

Depuis juin 2025, c’est-à-dire depuis un mois, 68 de ces centres ont été suspendus en raison même des ordres d’évacuation forcés, des attaques et des bombardements continus. Ça veut dire qu’aujourd’hui, on a 10 000 enfants sur liste d’attente, qui attendent désespérément de pouvoir entrer dans l’un de ces centres d’éducation temporaire. Et l’Unicef essaye tant bien que mal de continuer à opérer, de donner des cours, voire d’accueillir des enfants pour pouvoir les vacciner, leur donner un peu d’aide alimentaire, d’eau potable.

Et c’est ça qui est dramatique, c’est qu’effectivement, d’un point de vue logistique, notre mission est constamment dégradée. La qualité même des routes s’est considérablement détériorée en raison des bombardements. Si demain, on permettait aux camions de pouvoir rentrer, seuls des camions de petite taille pourraient le faire, parce que les routes ont été tellement bombardées qu’elles sont quasiment impraticables.

Dans ce contexte, quel est l’état de la malnutrition infantile dans la bande de Gaza ?

Selon les chiffres du ministère palestinien de la Santé, qui sont vérifiés par l’Unicef, cette dernière semaine, 100 personnes sont mortes de faim, dont 80 enfants. La malnutrition chez les enfants atteint des niveaux catastrophiques. La totalité de la population de Gaza, soit plus de 2,1 millions de personnes, est en situation de grave insécurité alimentaire. Sur la totalité de la population palestinienne, à peu près une personne sur quatre, soit 470 000 personnes, est confrontée à une situation de famine. C’est-à-dire que les gens meurent de faim. Ils se lèvent le matin, ils n’ont pas mangé depuis plusieurs jours, ils n’ont pas eu accès à de l’eau potable. Ils souffrent d’insécurité alimentaire aiguë.

Et sur ce chiffre-là, 71 000 enfants qui, s’ils n’ont pas un traitement d’urgence dans nos centres de santé pour malnutrition aiguë, par exemple des aliments thérapeutiques prêts à l’emploi, risquent de mourir. Encore une fois, il s’agit d’une catastrophe d’origine humaine, la solution est à portée de main et il faut nous laisser opérer, il faut lever le blocus.

 

Avec RFI

A propos guiquo-admin

Check Also

L’Union européenne et les États-Unis sanctionnent à nouveau la Russie

L’Union européenne a annoncé, mercredi 22 octobre, avoir trouvé un accord pour durcir ses sanctions …

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *