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Opinion : Docteur, sur cette sortie, bien que vous le prétendiez, vous n’êtes pas pour la patrie !

Vous n’êtes pas pour la patrie !  Quand, dans votre interpellation qui se veut vouloir son bien, vous faites abstraction la violation du pacte qui fonde la République stable. De bonne ou de mauvaise foi ? Chaque guinéenne ou guinéen digne et amoureux d’elle saura l’apprécier dans vos écrits.

 

Vous n’êtes pas pour la patrie ! Quand, après ce long silence (probablement pour voir le projet afin de le juger bien ou mal comme beaucoup de guinéens), et après avoir lu ce projet rétrograde par rapport à la constitution actuelle, vous en êtes encore à mettre dos à dos le pouvoir ouvertement et le FNDC subtilement en faisant croire que vous vous en prenez à des gens « opportunistes » que vous ne nommez pas alors même que vous nous exhortez à l’intégrité. L’exemplarité n’eût-elle pas été salutaire en ce sens docteur ? Pardonnez ce qui pourrait paraître comme une arrogance, mais je pense que si. Mal nommer les choses, jugeait Camus, c’est ajouter au malheur du monde. Ne pas nommer justement les choses cher docteur, est le voile sous lequel on cache le véritable et premier obstacle à la résolution d’une crise, le déni.

 

Vous n’êtes pas pour la patrie ! Quand vous mettez dos à dos disais-je, le pouvoir qui tente de rompre un pacte social et institutionnel par la force et le mépris, et le FNDC qui tente de l’en empêcher avec pour fondement le droit.

Comment pourriez-vous l’être, quand vous faites abstraction du fait que le pouvoir pour son but ultime, utilise tous les moyens y compris ceux illégaux et illégitimes allant jusqu’à tuer des guinéennes et guinéens, arrêter et déférer arbitrairement des jeunes pour intimider, frapper de vieilles personnes, humilier les femmes, brûler des biens publiques, en un mot,  viole quasiment tous les droits et libertés fondamentaux dans une démocratie ? Pire scénario, sa seule communication étant le déni et le rejet de la responsabilité.

Comment pourriez-vous l’être cher docteur, quand vous considérez le FNDC, qui lutte par le droit constitutionnel de manifester et par la protestation pour le respect de la loi et de l’alternance, autant responsable que ce pouvoir poisseux au cœur asséché et à l’âme peccamineuse ?

 

Non ! Vous n’êtes pas pour la patrie ! Quand vous feignez (oui vous feignez car vu vos densité et profondeur, on ne peut imaginer un seul instant que vous ignorez) de ne pas savoir que l’existence d’extrémistes ou la dérive minoritaire est le propre ou inhérente à tout mouvement de lutte. Et quand cela vous sert de fondement pour imputer la responsabilité de notre crise à une lutte certes non parfaite, mais qui s’inscrit dans la défense d’un héritage commun, la préservation du peu d’acquis démocratique qu’on a au prix du sang de nos compatriotes, du viol de nos soeurs et mères, et de tant de sacrifices que vous savez, vous trahissez votre rang.

On peut comprendre et même être d’accord avec vous sur le fait que cette crise arrange certaines personnes. Mais nul ne saurait nier que la raison ou la cause première et principale de cette crise qui favorise cet état de fait résulte de l’envie du président, hier implicite et aujourd’hui explicite par de manœuvres frauduleuses de la loi, des institutions et des sorties publiques ou médiatiques, de détourner le pouvoir.

 

On a prit la mauvaise habitude de nous plaindre des effets dont les causes au mieux nous laissent indifférent et au pire nous racolent.  La force du baobab nous dit-on, tient en ses racines ancrées profondément dans le sol. Pour le terrasser, il faut s’en prendre à ces racines. Pour dire qu’il faut s’attaquer à la cause de la crise et non perdre du temps sur les effets que tous les guinéens amoureux du pays déplorent. Et la cause n’est autre que cette envie et la détermination du pouvoir à aller au bout de son projet, celui de rompre le pacte de l’alternance démocratique pour nous faire basculer dans l’enfer de la présidence à vie au mépris de la loi suprême. Or, un adage du droit canonique de la France qui est notre modèle en ce domaine dit que « les pactes doivent être respectés » (pacta sun servenda).

L’attachement à la cohésion véritable et le vœux d’une patrie paisible voudraient que l’on proclamât cette vérité et exigeraient qu’elle fût claire à l’endroit du président de la République qui, par la disposition des choses, est le père de la « nation ». Et tout comme le père guide le fils, il est des moments où il appartient au fils de ramener le père à la lumière quand les ténèbres s’emparent de lui.

 

Vous n’êtes pas pour la patrie ! Quand, au lieu d’utiliser votre personnalité et votre intensité pour dire la vérité au débiteur principal de cette crise qui n’est autre que le président de la République, vous le magnifiez tel les grecs qui se livraient à des libations à l’endroit des dieux de l’Olympe. C’est à croire que le président n’est pas entouré d’amis fidèles. Serait-ce la loi de qui se ressemble s’assemble ?  Car oui, l’ami loyal et fidèle est celui qui sait nous regarder droit dans les yeux et nous dire qu’on se trompe quand c’est le cas. Et pas celui qui, alors même qu’il est conscient de la limite de notre humanité, nous fait sentir qu’on est indispensable, infaillible et divin au point de nous conduire vers notre propre chute, à jamais damné ! Une lecture ou relecture du discours sur la servitude volontaire d’Étienne La Boétie serait plus édifiant sur le fait que le pouvoir d’un roi ne tient qu’à un rien.

 

Vous n’êtes pas pour la patrie ! Quant au lieu de  dire au président que son projet est suicidaire pour notre jeune démocratie quel que soit le résultat, vous appelez à un dialogue (que vous savez fallacieux) alors même que vous savez pertinemment que tous les dialogues par le passé ont été violés quand eux, ne violaient pas loi. Les problèmes quant au dernier dialogue sont encore d’actualité. Depuis tonton Albert Einstein, il est connu que c’est une folie que de toujours faire la même chose et d’attendre un résultat différent. Ainsi, cher docteur, à quoi sert le dialogue que vous appelez de vos vœux en lieu et place du respect de la loi ? Quels sont ses sens et finalité, quand il part de la violation de la loi et d’un passif de non-respect de la parole donnée, si ce n’est de faire bonne figure ou se donner bonne conscience ? Voyez- vous cher docteur, « à celui qui rompt la foi, la foi n’est plus due » dit l’adage.

 

Cher docteur, ceux qui comme moi, ne croient pas au dialogue sur cette question ne sont pas nécessairement contre le pays. Il l’aime autant que vous si ce n’est davantage. Ils refusent juste, par expériences, d’être leurrés. Ils refusent juste d’être des marionnettes manipulables à la volonté du marionnettiste. Ils proposent une nouvelle approche après avoir payé les frais de celle du faux dialogue depuis près d’une décennie avec son lot de morts, de blessures et de douleurs encore présentes à l’esprit et sur le corps.

Nous n’avons pas la mémoire courte pour oublier les sacrifices consentis en 2007, en 2009, et tant d’autres pour jeter aux oubliettes toutes les âmes arrachées, celles déchirées à jamais, celles marquées par le sceau maudit de l’injustice et laisser à un pouvoir qui a bénéficié de ces luttes le loisir de nous replonger dans une situation pire que celle que NOUS combattions.

Si pour cela, on est taxé d’extrémistes, alors beau mot que l’extrémisme ! Surtout quand c’est de la part de personnes qui osent mépriser et se jouer des guinéens qui luttent non pour une promotion individuelle, mais pour un épanouissement commun, un État de droit respectueux des droits et libertés fondamentaux et d’une démocratie qui respire la brise porteuse de fraîcheur.

 

Je continue à croire que la Guinée sera débarrassée des chaînes qui l’étreignent mortellement au cœur ainsi que du peuple de démons qui, en son sein ribote.

 

À bas KORO-KHA-VIRUS, (le virus de koro, 3eM),

Vive le respect de la constitution,

Vive le respect de l’alternance démocratique,

Vive la Guinée !

 

Diogo TCHEZE

 

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